Situation des enfants à Gaza : "Ce que nous offrons est irremplaçable pour les enfants privés de soins parentaux."

Il y a environ 500 jours, des enfants du Village d’Enfants SOS de Rafah, à Gaza, ont été évacués en Cisjordanie. Malheureusement, des milliers d’enfants sont restés à Gaza, où la situation humanitaire est dramatique. Ghada Hirzallah, Directrice de SOS Villages d’Enfants Palestine, et Reem Alreqeb, coordinatrice du programme à Gaza, partagent comment ces enfants font face aux traumatismes et comment les équipes locales assurent leur prise en charge, leur éducation et leur accompagnement psychosocial.

Quelle est la situation actuelle des enfants privés de protection parentale en Palestine, notamment à Gaza ?

G.H. : En Palestine, la situation des enfants privés de protection parentale est extrêmement fragile et s’est considérablement détériorée en raison du conflit et des déplacements continus, en particulier à Gaza. Dans la bande de Gaza à elle seule, plus de 39 000 enfants ont perdu un ou deux parents depuis le début de la guerre, et 19 000 ont perdu les deux.

Les systèmes de protection censés les soutenir sont dépassés, et les solutions de prise en charge alternatives sûres sont limitées. Selon l’UNICEF et l’OCHA, le bien-être psychosocial de ces enfants est gravement affecté, et beaucoup vivent dans des environnements dangereux avec un accès restreint à l’éducation, aux soins de santé ou au soutien émotionnel.

Actuellement, nous prenons en charge près de 200 personnes dans le camp de Khan Younès — dont 65 enfants non-accompagnés — en plus de plus de 2 000 enfants suivis dans le cadre de notre programme de renforcement des familles.

R. A. : Il y a des enfants qui sont arrivés chez nous après avoir vécu des expériences traumatisantes. Ils ont perdu leurs parents ou ont même vu leurs parents se faire tuer, les ont vus souffrir avant de mourir. Certains enfants ne se souviennent pas d'où ils viennent.

Quels sont les plus grands défis auxquels ces enfants sont confrontés aujourd’hui ?

R. A. : La vie dans le camp est une lutte constante. Nous nous battons chaque jour pour obtenir de l'eau, de l'électricité, de la nourriture et tant d'autres produits de première nécessité pour les enfants et les personnes qui s'occupent d'eux. Mais malgré toutes ces difficultés, notre équipe continue de travailler sans relâche pour le bien des enfants.

G. H. : Les traumatismes et les troubles de santé mentale sont très répandus, en particulier chez les enfants de Gaza et des zones marginalisées. À cela s’ajoutent les interruptions de la scolarité causées par les déplacements, la destruction des écoles, et l’absence de matériel éducatif. L’exposition accrue au travail des enfants et à l’exploitation est également préoccupante, dans un contexte de pauvreté croissante.

De quelle manière SOS Villages d’Enfants Palestine soutient les enfants et les familles dans cette crise humanitaire ?

G. H. : SOS Villages d’Enfants Palestine propose un modèle de prise en charge complet, incluant la prise en charge alternative pour les enfants privés de soins parentaux dans nos structures situées à Bethléem (Cisjordanie) et dans la zone sécurisée de Khan Younès (bande de Gaza). Ils y trouvent un foyer stable, une éducation et un accompagnement psychosocial.

Dans le cadre de notre réponse d’urgence, nous avons lancé des projets en partenariat avec des organisations internationales comme l’UNICEF et l’OCHA, pour soutenir les enfants déplacés et traumatisés à Gaza et en Cisjordanie. Nous leur fournissons un abri, de la nourriture, un environnement sûr, l’accès à l’éducation, des espaces adaptés aux enfants ainsi qu’une aide humanitaire de base. 

Les enfants que vous accompagnez ont subi de nombreux traumatismes. Pouvez-vous nous en dire plus sur le soutien psychosocial que vous leur apportez ?

G.HChez SOS Villages d’Enfants, nous créons un environnement sûr et bienveillant dans lequel les enfants peuvent recommencer à être simplement des enfants. Chaque enfant est accueilli dans un cadre familial aimant où il est vu, écouté et soutenu.

Nous savons que derrière chaque enfant qui s’épanouit, il y a une personne qui lui a offert un sentiment de sécurité et de reconnaissance. Ce lien est essentiel à la guérison du traumatisme et à la construction de la résilience.

Nos éducateurs formés assurent un soutien émotionnel quotidien et une stabilité, qui sont la base du bien-être mental à long terme. Nous proposons également un accompagnement psychosocial structuré : des séances de groupe, des consultations individuelles adaptées à chaque enfant, et un accès à des professionnels de santé mentale si nécessaire.

Lorsqu’un enfant se sent soutenu, il peut grandir avec confiance. 

R. A. : Il n'est pas facile de rester résilient, compte tenu des circonstances difficiles dans lesquelles nous vivons. Mais nous savons, en tant qu'équipe, que beaucoup de gens et beaucoup d'enfants comptent sur nous. 

D’après votre expérience, comment les enfants et les jeunes décrivent-ils leurs espoirs et leurs rêves pour l’avenir ?

G. H. : Malgré les épreuves, de nombreux enfants et jeunes que nous accompagnons continuent de rêver d’un avenir meilleur. Ils rêvent de paix, de pouvoir rentrer chez eux à Gaza, et de vivre en sécurité.

Beaucoup nous disent qu’ils veulent simplement retourner à l’école et vivre à nouveau avec leur famille. Certains souhaitent poursuivre leurs études et espèrent un jour pouvoir reprendre leurs formations et bourses.

Ce dont ils ont le plus besoin, c’est de stabilité et de protection pour pouvoir croire en leurs rêves.

R. A. : Parfois, nous perdons espoir et pensons qu'il n'y a pas d'avenir. Mais lorsque nous demandons aux enfants quels sont leurs rêves, certains répondent qu'ils veulent devenir médecin, infirmier ou avocat pour défendre nos droits. Cela nous donne la force de continuer et d'accomplir notre mission.

L'action de SOS Villages d'Enfants Palestine à Gaza en quelques chiffres

Depuis le 7 octobre 2023 : 

• 31 192 enfants ont bénéficié de nos interventions.
• 45 enfants non accompagnés ont été réunis avec leur famille d'origine.
• 30 632 personnes ont bénéficié d'un soutien psychosocial
• 16 632 personnes ont reçu de quoi couvrir leurs besoins essentiels (alimentation, eau et hygiène).
• 1 300 enfants ont bénéficié de services éducatifs

Cet article, initialement publié le 31 juillet 2025, a été mis à jour le 20 août 2025.