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« Être simplement là » : le lien de Sara et Faisal à Hejmo Plus

Écrit le 9 décembre 2025

14 jeunes âgés de 16 à 18 ans,
arrivés en Belgique sans leurs parents, vivent à l'abbaye de Keizersberg à Louvain. Avec d’autres étudiants, ils partagent un petit logement. SOS Villages d'Enfants les accompagne sur le chemin de l'autonomie.
Aidez des jeunes comme Faisal
À leur arrivée en Belgique, Faisal et ses camarades n'avaient personne sur qui compter. Grâce aux éducateurs de Hejmo Plus à Louvain, ils se sentent vus et entendus. 

Par un après-midi d'hiver, dans la cuisine de Hejmo Plus, Sara, éducatrice, étudiante jobiste et psychologue en fin de formation, nous parle de son approche. C’est alors que Faisal, 17 ans, l'un des jeunes d'origine afghane, entre dans la pièce. Il a l'air calme, mais ses mots font l’effet d’une bombe dans la pièce. 

« J'ai mal au cœur », dit-il.

Avant d’ajouter : « Ma sœur est décédée. »

Une journée trop difficile pour aller à l'école

Faisal explique qu'il est resté à la maison aujourd'hui parce qu'il était malade. Ce n'est pas dans ses habitudes, c'est un élève sérieux et consciencieux. En réalité, il est resté parce qu’il avait du chagrin. Sa sœur est décédée, loin d'ici, dans des circonstances qu'il ne connaît pas encore. Il ne sait pas comment, ni quand exactement. Mais il sait qu'elle n'est plus là.

Sara l'écoute. Son visage exprime de l'inquiétude, mais aussi de la reconnaissance : elle connaît ce langage du « chagrin ». « Pour lui, le chagrin signifie une profonde tristesse », dit-elle. Bien qu'elle soit en pleine interview, son métier prend le dessus. Elle interrompt notre conversation pour se lever et accompagner Faisal dans sa chambre pour discuter. Mais il reste assis. « Je reste ici, on peut parler ici », dit-il doucement.

Elle est simplement « là »

Faisal explique, parfois en cherchant ses mots, parfois avec une clarté surprenante, ce que Sara signifie pour lui : « Elle m'aide dans tout », dit-il. « Si j'ai besoin de quelque chose, elle ne me dit pas : ça attendra demain, j'ai fini ma journée. Elle ne fait pas ça. Elle fait de son mieux. » Il raconte leurs parties de Uno et leurs blagues, mais surtout sa présence qui brise la solitude qui le ronge depuis six ans, lorsqu'il a quitté l'Afghanistan. « Quand elle est là, je ne me sens pas seul. Normalement, je me sens toujours seul. Mais avec Sara à mes côtés, je me sens bien. »

La chaleur de ses mots laisse Sara sans voix pendant un instant. Elle est touchée. « J'espérais que les garçons comprendraient que c'est vraiment mon choix d'être ici. Que je veux terminer ma semaine avec eux. Non pas parce que c'est mon travail, mais parce que je suis quelqu’un d’humain. Maintenant je suis sûre qu’ils comprennent. »

Le pouvoir de la présence

Ce que Sara fait à Hejmo Plus peut paraître simple. Elle est là un soir par semaine. Elle s'assoit dans le salon. Ceux qui le souhaitent viennent la rejoindre. Ceux qui ne le souhaitent pas n'y sont pas obligés. Mais cette disponibilité est fondamentale pour beaucoup de jeunes. « Le sentiment que quelqu'un est là pour vous », explique Sara. « C'est un besoin fondamental. » Et c'est précisément ce qui se confirme dans un moment comme celui-ci. « Sa tristesse, sa solitude, ses responsabilités à la maison, la pression pour réussir à l'école : il porte tout cela en même temps », explique Sara.

Faisal acquiesce. « Quand on est seul, on ne peut pas rêver », poursuit-il. « On ne peut pas étudier. Notre cœur change. Mais quand quelqu'un est à nos côtés... on peut essayer de faire de bonnes choses. Sara est quelqu'un qui me voit, qui m'écoute, qui me comprend. Elle me regarde dans les yeux et elle sait comment je vais. C'est très agréable. Cela me donne du courage. »

Un avenir plein d'espoir

Faisal est à l'aube de l'âge adulte. Dans quelques semaines, il aura 18 ans et déménagera ailleurs. Cette perspective le rend heureux, mais aussi anxieux. « Elle va me manquer », dit-il à propos de Sara. Mais en même temps, il est déterminé : « J'étudie beaucoup. Je veux devenir électricien. Je veux maîtriser un métier. Contrôler ma vie. » Il parle de l'avenir comme s'il s'agissait d'un désert, mais d'un désert dans lequel il veut trouver de l'eau. « Il n'y a pas d'eau dans le Sahara. Mais si vous cherchez, vous pouvez en trouver. Si vous ne cherchez pas, vous mourez. Alors je cherche. »

Un message pour Sara

À la fin de la conversation, Faisal regarde Sara avec un sérieux qui n’est pas habituel à son âge. « Nous n'avons personne dans ce pays », dit-il. « Nous avons besoin de vous ; et tu fais vraiment de ton mieux. Tu es une très bonne éducatrice. » C'est une confirmation douce mais puissante de ce qui a un jour motivé Sara à postuler pour ce job et continue de la motiver depuis. Savoir que sa présence et ce petit geste humain font toute la différence pour des jeunes comme Faisal.

Puis Faisal se lève d'un bond. Il veut aller courir.

« Tu me suis à vélo ? » demande-t-il à Sara.

Elle sourit. « On y va ? »